Connexion

La Capitana

La Capitana

La Capitana
de Elsa OSORIO
ed. MÉTAILIÉ

Elsa Osorio découvrit Mika Etchebéhère au milieu des années 80 mais mit près de 20 ans avant de lui rendre hommage par le biais de ce roman nourri de toute la documentation et des témoignages disponibles. Au vu de la stature du personnage, on comprend très vite pourquoi elle a pu être intimidée si longtemps avant d’oser se lancer dans l’aventure.

Le résultat est magnifique. On partage tout au long du roman l’amour et l’admiration que l’auteure ressent pour cette femme remarquable et déterminée.

Celle-ci, née en Argentine, est morte en 1992 à l’âge respectable de 90 ans à Paris après une vie passée au cœur des luttes et révolutions populaires du XXème siècle. Ses convictions anarchistes revendiquées tout en maintenant son opposition marquée au dictat du parti communiste l’ont rejetée dans l’anonymat alors que sa personnalité, son intelligence et son courage avaient tout pour faire d’elle une grande héroïne populaire.

Centrant le cœur de son récit sur les quelques mois de la guerre d’Espagne au cours de laquelle Mika eût la douleur de perdre son époux mais gagna ses galons de capitaine au sein du POUM, l’auteure parvient à donner une épaisseur étonnante à son héroïne tout en lui (re)donnant sa dimension d’égérie. Amoureuse éperdue de son révolutionnaire de mari, militante au sein des organisations et publications anarchistes les plus diverses, combattante des fascistes l’arme à la main ou vieille dame encore verte attendrie par les derniers feux du mai 68 parisien, les multiples personnalités et aventures de Mika Etchebéhère forcent l’admiration et donnent au récit un souffle incontestable.

Elsa Osorio aborde également de manière très subtile toute la difficulté qu’il y a à se retrouver unique « Capitana » au cœur d’un monde d’hommes, tout à la fois mère, sœur, amie et protectrice de ses soldats sans jamais rien céder à l’exigence et au courage qui la portent sans cesse au combat.

Un grand et beau récit épique qui permet aussi – et malheureusement -de mesurer combien notre époque actuelle manque de personnalités de cette trempe et de cette envergure.

« -Ce sont mes enfants mais aussi mon père. Je les protège et ils me protègent. Ils se soucient du peu que je mange, de mon sommeil, ils trouvent miraculeux que je résiste autant ou plus qu’eux aux duretés de la guerre. (…) Et d’une manière plus compliquée, plu subtile, ils sont aussi mon mari. Et moi, leur femme. »

[... et Charybde 2 est résolument d'accord...]