L'ouragan
Prix éditeur : 6,40 €
Collection : POCKET
Éditeur : POCKET
EAN : 9782266236492
Parution : 6 mars 2014
Pagination : 149 p.
Poids : 88 g.
Coup de cœur
Vrai-faux road-novel amoureux, rêverie sous speed sur les "secondes chances". Bien réussi.
Étonnantes retrouvailles avec un auteur par moi perdu de vue, depuis ses premières nouvelles dans les années 70, sous l'égide bienveillante de Bernard Blanc et d'Yves Frémion (je me souviens notamment avec grand bonheur des magnifiques Les maîtres du monde et La ballade des dieux, dans les revues Univers 15 et 18).
L'auteur a depuis lors écrit des dizaines de nouvelles (que je vais m'empresser de découvrir maintenant), mais c'est avec un roman, son premier semble-t-il, qu'il est publié en 2012 chez Stéphane Million.
Roman échevelé en diable, comme son titre le laissait supposer, L'ouragan suit Antoine, modeste cultivateur stéphanois, cinquantenaire et célibataire, se voyant sans attraits notables, et qui n'a guère "vécu" jusque là lorsque débarque dans sa vie, par hasard, flamboyante, la Patagone Bahia, qui lui révèle vite une toute autre existence, de beauté permanente, de bonheur serein et de sexe joyeux.
Las, lorsque des morceaux d'une vie précédente de la fantasque Argentine se manifestent, le drame survient, et Antoine torpille dans un accès de colère cette nouvelle vie inespérée, entamant alors une fuite éperdue et picaresque, jusque dans l'Ouest américain, en un vain effort pour oublier d'abord et peut-être retrouver ensuite le Paradis perdu dont il s'est lui-même chassé, en compagnie de personnages croisant sa route et s'y attachant, paumées au grand cœur à la Fajardie, cowgirls entrepreneuses, ranchers amérindiens à la taciturne sagesse, ou encore compagnons de beuverie et de faconde que l'on jurerait parfois préparer l'apparition d'un oiseau canadèche cher à Jim Dodge.
Vrai-faux road novel, improbable et belle histoire d'amour, méditation conduite sous excitants sur la "deuxième vie" ou la "deuxième chance". Tout cela, et une jolie réussite.
Aussi Antoine s'exprimait-il peu. Il ne desserrait pratiquement plus les dents depuis son passage dans cette banque stéphanoise, pour placer le magot à son identité d'emprunt. Elle pourrait lui expédier n'importe où des liquidités. La valise bourrée de liasses de gros billets, à la chargée de clientèle éberluée :
- C'est un héritage. Un oncle. Il a vendu des terrains à bâtir. Il dépensait rien. Il faisait pas confiance aux banques. Il cachait ses sous dans des boîtes en fer. C'était un plouc.
Giflé par les rires de la femme !
Dire plouc pour la première fois de sa vie, s'insulter, et devant elle. Déstabilisé par ses bracelets de brillants qui toctoquaient le clavier de l'ordinateur, la manchette de son journal financier sur la guerre économique, autour des yeux, sur les paupières et la bouche ses peintures de guerrière. Ou de star de cinéma. Qui ne l'attirait pas.
Depuis sa rencontre avec Bahia il n'avait plus ni cerveau ni sexe. Mais dans sa tête et son entrejambe un organe unique, indéfinissable, tout à elle dévolu. (...)
Moque-toi banquière, et je te tue !
Bahia vantant la dure, douce, redoutable, rassurante sauvagerie du vent patagon, elle causait d'elle, tiens, fille de cette dinguerie.
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