"Il regarde sans chagrin s’éloigner les rivages de son pays, tout entier habité par l’exaltation de l’aventure. Le vaisseau immense, aux voiles blanches déployées dans le vent, les ordres criés dans cette langue sonore et gutturale qu’il ne comprend pas encore : c’est le voyage aux confins du monde qui commence à cet instant. En cette fin de la quatrième année du règne de Young Li, le 1er janvier 1651 selon le calendrier chrétien qui va désormais rythmer sa vie, Pan Wen, alors âgé de 10 ans, quitte son pays en proie à la guerre civile, porteur d’un message de sa souveraine, l’impératrice de Chine, au pape Innocent X. Accompagné de Michal Boym, jésuite polonais érudit et obstiné, il n’aura de cesse de parvenir jusqu’à Rome, puis de rendre compte à l’empereur de son entrevue avec le souverain pontife.
De la Chine à Rome, de Lisbonne aux montagnes sauvages du Tonkin, par l’antique route de la soie ou sur d’insalubres caraques portugaises, leur voyage durera neuf longues années. Après L’Interprète de Poivre qui retraçait les débuts du commerce maritime avec l’Asie, Hélène Fillet-Phan Van Song s’intéresse ici au rôle qu’a pu jouer la volonté missionnaire de l’Église dans la découverte de l’Orient."