Aden
20/01/2012 Coups de coeur
Un informaticien de haut niveau réalise à la fois la véritable nature de son travail et les raisons profondes de son reniement de ses origines...
Prix Fémina 1992, le sixième roman d'Anne-Marie Garat, faussement intimiste, explore la mémoire et l'identité familiale comme ressorts de l'être, à travers la figure d'Aden Seliani, informaticien de haut vol confronté à un double choc peut-être salutaire.
Fils unique d'obscurs immigrés moldaves, réalisant par un concours de circonstances la nature exacte de son travail (et notamment de ses commanditaires), replongé après des années d'éloignement dans la triste banlieue de son enfance qu'il avait reniée au fil des années, où, trois jours et trois nuits durant, sa mère inconsciente se débattra dans le coma, avant de mourir, suite à un banal accident, Aden Seliani va tenter de se retrouver, de redevenir enfin, complet et transformé, celui qu'il devrait être.
Maintenant, il se voit comme un idiot, avec les clefs du bunker, l'accès direct à tous les dossiers, à tous les types de programmes de l'Agence, cette forteresse d'intelligence et de rigueur scientifique qu'est le service du Trocadéro, avec son personnel trié sur le volet, un pion servile, privé de raison, qui a renoncé à la raison, à toute exigence de la raison, même pas par idéalisme béat, ou dans l'aveuglement d'une passion pour l'informatique et sa cuisine, même pas par goût de l'argent ou de sécurité professionnelle. Par démission systématique, résignation délibérée, l'abandon de tout contrôle. Renoncement à soi consenti, sans contrepartie. Parce que cette entreprise, d'abrutissement personnel, cette manière de s'oublier dans le travail, lui convenait.