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Sylvia

Sylvia

Sylvia
de Antoine WAUTERS
ed. CHEYNE ÉDITEUR

«I am lame in the memory» (Sylvia Plath)

Dans sa poésie, Antoine Wauters invoque, avec une mémoire forcément parcellaire, la fin de vie et la disparition de ses deux grands-pères Charles et Armand, le corps et la mémoire qui redeviennent légers comme une plume et puis cendres, une vie de fin qui ramène l’homme à ses balbutiements, et ceux qui restent au temps qui est compté et à la nécessité de vivre.

«Maintenant que vous êtes nus, feu au feu, en la cendre la cendre, tu me viens par grâce, Sylvia. Arquée comme petite. Et tout ce que tu parviens à saisir de moi, en moi, ou à toucher entre les points jamais comblés du corps, et que tu entends et qui s'écrit ou même s'essouffle, considère-le comme la plus mince parcelle encore, mon bruissement, la poussière

Avec l'évocation de ces disparitions, des traces qu’il reste des deux hommes dans leurs maisons, dans leurs vêtements, et dans la mémoire comme des dépôts de fumée, l’auteur est atteint par l’écho des vers de Sylvia Plath, en particulier ceux d’"Ariel", de "La traversée" et d’"Arbres d’hiver", émaillant sa poésie de leur éclat noir si profond.

«"La douleur qui me réveille n’est pas la mienne", dis-tu. Et t’entendre le dire m’apaise, en ce treizième jour de deuil. Et peu à peu je le dépose, le cœur, ou métal saccadé et strié, bleu aux pointes de tristesse qu’il tient entre les veines. À l’utopie d’avoir des veines. De déposer quelqu’un, ou soi, chez soi, au fond d’une maison vide, les os qui craquent dans le métal, le fauteuil ou la chaise vide du cœur. À l’utopie d’en avoir un, Sylvia.»

Je veux encore entendre et lire la voix d’Antoine Wauters.

«Corps que tu veux simplement quitter, d’où tu veux simplement sortir, comme d’un sablier triste dans lequel depuis toujours tu étoufferais. Sortir lentement, par la soif et la faim, kilo après kilo et grain de sable après grain de sable, jusqu'à retrouver la parfaite transparence. Ou corps que tu veux lisse, lavé, vieille masse que tu veux voir absoute de ses excès – de colère et de rage – et de ses manques aussi – de tendresse et d’amour.»